On sonnait d’abord les « jointes », ensuite la famille envoyait dans chaque maison une femme d’un certain âge qui annonçait le décès et l’heure des obsèques. Elle disait : » je viens prier pour untel qui sera enterré le … à telle heure ».
Suivant la bourse du défunt, la cérémonie durait plus ou moins longtemps car il y avait 3 catégories, comme dans le train. A la fin des enterrements des plus riches, le pain bénit était distribué à chaque participant, si bien que les enfants restés à la maison attendaient ce morceau d’épaisse galette en toute innocence. En ces temps reculés, les gâteries ne couraient pas les rues.
Les moins bien nantis avaient un cercueil en bois blanc et une petite tombe semblable à une taupinière que l’on fleurissait cependant et visitait régulièrement. C’était beaucoup plus simple que ces monuments d’aujourd’hui et bien plus proche de la nature. On rencontre encore cette simplicité dans des cimetières canadiens entre autres, avec de grands parcs bruissant d’oiseaux, sans fioritures inutiles. Je dirai en passant que je les préfère aux nôtres…)
Jusque dans les années 70, la famille du défunt faisait savoir la date et l’heure des obsèques par un vieux garçon qui faisait tout le tour des hameaux en vélo, puis en mobylette par la suite. Tout le monde lui payait un coup à boire, à la santé du défunt. En fin de journée, le pauvre gars arrivait dans la cour, il ne se souvenait plus ni de l’heure, ni du jour, et ne retrouvait même plus dans ses poches le petit papier sur lequel la famille avait pourtant tout noté … Il fallait téléphoner à la mairie pour savoir. Je trouve cette démarche conviviale, beaucoup moins impersonnelle que d’apprendre les nouvelles par le journal.
Le cercueil était porté également par des proches du défunt, qui allaient le chercher dans sa chambre, installaient le cercueil dans le fourgon, le déposaient à l’église, au milieu des gerbes de fleurs et des plaques de marbres. A la fin de la cérémonie, ces mêmes personnes remontaient le cercueil dans le fourgon qu’ils précédaient à pied jusqu’au cimetière. Après une dernière bénédiction, les porteurs descendaient la dépouille de leur ami et voisin au fond du caveau, attendaient le départ de la famille pour saluer le défunt une dernière fois, et ranger les fleurs en retirant toutes les cartes de condoléances qui y étaient jointes. Revenus au bourg, ils allaient prendre une collation à l’auberge (charcuterie, omelette, etc).
Cette convivialité dans la peine et la douleur n’avait rien de déplacé. Cela se passait ainsi depuis des générations avant l’arrivée des sociétés professionnelles qui assurent ce service d’une façon parfois trop commerciale.

