Textes et photos © Muriel Azemard
Bonjour à toutes et tous !
La thématique fait prendre conscience du temps qui passe, qui nous traverse, qui rythmait autrefois la journée d’un village, ainsi que celle d’une communauté religieuse. Pour exemple, lorsque apposé au mur extérieur d’une église et auquel les villageois et gens venus de l’extérieur se référaient alors. Nous verrons ensemble que pour certains cadrans, sur les pierres gravées, la diversité évoquée ci-dessous n’est pas qu’une impression, un ressenti. Elle s’incarne, notamment, pour les cadrans canoniques que j’ai pu observer. Six heures seulement, chiffres romains. J’en parle dans cet article dédié.
Attention toutefois. Car pour en connaitre l’usage, bien vérifier la position du cloître par rapport à l’église (cloître au Sud ou cloître au Nord), si le cloître est au Sud, le cadran solaire n’est pas accessible aux laïcs et son usage peut-être alors différent.
En balades le nez en l’air, c’est ce que je vous propose ici. Parcours et arrêts sur images élevant le regard vers la course solaire choisie.
Après vous avoir montré des visuels qui ornent le flanc Sud des édifices, je me suis concentrée sur la pierre qui inscrit le temps et qui montre une certaine diversité. C’est une invitation à la découverte, celle que je photographie tout au long de mes itinérances pour le Berry Roman à Vélo.
Bienvenue pour le parcours patrimonial que j’ai rédigé pour le proposer aux lecteurs sur Berry Au Coeur de France.

Les cadrans canoniaux
& leurs particularités
Pour les moines bénédictins ou les chanoines réguliers, la journée était rythmée par des célébrations d’office : Matines, Laudes, Prime, Tierce, sexte, None, Vêpres et Complies.
Le cadran canonial n’est pas gradué, il se présente généralement sous la forme d’un demi-cercle, il est disposé sur un plan vertical (mur d’une église) face au sud (ou presque), le style est perpendiculaire au plan. Il se distingue donc des autres par son nombre de graduation (4, 6 ou huit), mais pas 12 comme les autres (cf ; l’Ange du Temps de Chartres). En fait dans tous les cadrans montrés dans cette enfilade, il y en a très peu qui peuvent être qualifiés de canoniaux.
Ce que l’on peut en dire, c’est que pour Matines er Complies, le cadran ne pouvait fonctionner car ces deux offices avaient lieu la nuit. Il reste donc 6 moments de prière à repérer. Le trait horizontal peut-il être considéré comme deux graduations ? Si oui : il y en a 6 – si non : il y en a 4.
6 graduations... oui mais : doit-on prendre en compte les graduations ou les intervalles ? Considérer les intervalles, me semble plus logique, dans la mesure où Laude est à l’Aurore et Complies juste après le coucher du Soleil, on comprend bien qu’en fonction de la saison, les moments de prière sont disposés à des intervalles différents.
À quoi correspondent les graduations de ce type de cadran ?
Peut-on établir un lien avec les heures canoniales, les petites et le grandes heures ?
Comment faisait-on pour repérer l’heure des offices de nuit : Mâtines, en principe à minuit mais pas toujours et Complies vers 19 heures (il fait nuit en hiver)
Il y a quand même une chose qui me laisse parfois perplexe. On trouve de ces cadrans que l’on veut bien appeler « canoniaux », sur des églises où il n’y a jamais eu de chanoines, jamais de communautés religieuses, même jamais de cloître, mais seulement un brave prêtre de campagne, donc pas d’heures canoniales à célébrer. C’est le cas de Vornay et de Jussy Champagne, c’est même le cas de Blet, Il n’y avait pas de cloître à l’église de Blet qui était purement paroissiale. On pourrait même ajouter qu’au Moyen Âge, les chanoines comme les moines se souciaient très peu de la notion d’exactitude horaire.
Toutefois : à l’époque romane, on n’avait pas de pendules, c’est d’ailleurs pour cela qu’Aliénor d’Aquitaine avait offert à son amant le roi d’Angleterre, un petit cadran solaire gravé sur une bague, afin qu’il soit à l’heure aux rendez-vous qu’elle lui fixait. Eh oui !
Réflexion plus générale également sur les cadrans dits « canoniaux »
et les autres…
Les canoniaux ne sont pas gradués en heure, les autres le sont, on peut s’interroger sur la notion d’heure dans les établissements religieux du Moyen Âge, avec peut-être un lien avec les fameuses Heures canoniales, je ne peux pas m’imaginer qu’il n’y en ait pas. Pour les religieux de l’époque, le temps écoulé n’était sans doute pas un souci, par contre la position du Soleil était primordiale pour eux. Je ne sais pas si je fais bien comprendre la nuance. Quoi qu’il en soit, autant de questions que les spécialistes de passage sur Berry Au Cœur de France peuvent alimenter. N’hésitez pas 😉

Il y en a pas de si nombreux, exposés sur les façades Sud du Berry Roman. Pour leur particularité, c’est donc par eux que j’initie cette série en quête de Soleil.
Civray
Le cadran canonique est apposé à 1 m au-dessus du clocher-porche de l’église romane St-Pierre de Civray où je me trouvais cette journée de découvertes. Une église du XIIe s. dans le département du Cher, elle jouxte une ancienne voie Antique vers laquelle j’alla me balader aussi : celle-ci reliait Bourges à Argenton-sur-Creuse. La tour-clocher de l’église romane de Lunery, présente un cadran identique.
La création d’un prieuré de bénédictins se fait dans la continuité d’une exploitation antérieure, dépendante de l’Abbaye St-Sulpice de Bourges. On passe par Civray pour aller à Chârost, communes peu distancées entre elles.

Il est tourné vers le Sud, et son stylet est toujours présent, ce qui n’est pas le cas d’autres que je rencontrais. Ce cadran est constitué d’un demi-cercle divisé en six portions égales et soucieuses d’une organisation définies par des temps inscrits ainsi : pour le recueillement, la prière, de même, donnant tout simplement l’heure aux habitants de la commune.


Église romane Lantan
05/10/2012


Mais en fait, ces cadrans canoniaux pouvaient également inscrire 8 portions. J’ai rencontré cela à Blet notamment (Cher).
L’église St-Paul de Lantan – XII e s., outre son cadran canonial, est composée d’une tour-proche, d’une nef rectangulaire et d’une abside semi-circulaire. La porte qui est percée au Sud, est couronnée d’un tympan sculpté d’une croix ancrée, avec gemmes. La chapelle est voûtée d’arrêtes, et elle s’ouvre sur l’extérieur depuis une porte encadrée de moulures et de caissons. Une jolie église je découvrais là.
Église romane Blet
Ce cadran canonial réserve au visuel la petite surprise de découvrir la quatrième heure inscrite ainsi IIII et non pas IV. Situé côté nef, il présente ses 6 heures du matin, à 6 heures du soir.
1. Aujourd’hui, il manque deux travées à la nef.
2. Le cloître était adossé au mur sud de la nef, sa largeur (environ 4 mètres) et sa hauteur, sans doute importante si l’on en juge par la position des corbeaux sur lesquels reposaient les voutes, tout ceci fait que le mur sud était bien à l’ombre, il l’est encore aujourd’hui.
3. Le coutumier de 1380 nous dit que les heures canoniales étaient rythmées par la cloche du cloître sonnée par le sacristain, et par des crécelles agitées dans les bâtiments conventuels.
Collégiale – Le Châtelet
19 Avril 2011 – Ce cadran sur l’église Notre-Dame de Puyferrand, a égaré son stylet et de mon côté, j’empruntais à un visiteur son stylo, lors de ma visite guidée (et ayant omis de le lui rendre en fin de visite).
Sur l’itinéraire de Saint-Jacques de Compostelle, sont deux lieux de culte au Châtelet : l’Abbatiale Notre-Dame-de-Puyferrand et Saint-Martial. La façade de l’église abbatiale est orientée vers l’Est, comme la plupart de nos églises. Soit orientée vers Jérusalem. Puyferrand qui surplombe Le Châtelet, est antérieure à l’église Saint-Martial située, elle, en contrebas. Entre les arbres à proximité de l’édifice, vous pourrez apprécier un joli panorama.

Regardez bien, le chiffre 4 en chiffre romain s’écrit « IV ». On est d’accord !! Sur les deux cadrans solaires (Blet et Neuilly-en-Dun), le 4 est écrit « IIII ».
Erreur du graveur ?? Non, tradition horlogère tout simplement. Observez une comtoise, ou une vieille horloge, de celles qui ornaient les salles à vivre de nos grands-mères et que l’on remontaient avec des poids, vous verrez que le 4 est également écrit « IIII ». Les touts premiers horlogers ont institué cette tradition, pour plus de lisibilité.
D’où l’importance pour dater ces cadrans solaires, ils ne peuvent pas être antérieurs à l’apparition de l’horlogerie, soit le milieu du XVIe s., et l’apparition des horloges à une seule aiguille (cf. l’horloge du clocher de l’église de Drevant)

Certaines églises, comme la collégiale, sont sur le Chemin de St-Jacques de Compostelle, pour d’autres pas du tout (Bussy, Osmery, Blet, etc.). S’il n’y avait pas Jussy-Champagne, on pourrait parler de routes où circulaient des pèlerins (Rome, Terre sainte). Mais il y a Jussy-Champagne, ça complique tout… La voie romaine est à environ 2 km de l’église !! De ce point de vue, je crois plus aux graffiti qu’aux cadrans solaires.
Aussi, lors de mes toutes premières découvertes, je me souviens avoir été étonnée de ne pas avoir vu parmi elles un cadran à Chalivoy-Milon, Loye-sur-Arnon et d’autres sous mêmes exemples. Par après, je compris que ces deux églises ont des enduits neufs, et ceci explique peut-être cela.
Église romane – Bussy
En allant comme je le fis (04/10/2012) ouvrir la porte du cimetière de Bussy, vous découvrirez cet authentique cadran canonial, plus précisément, il est situé sur l’une des colonnes de réemploi du mur Sud. Cadran vertical donc, gnomon perpendiculaire au plan, ce n’est pas la précision qui est recherché, mais simplement le fait de rythmer les heures canoniales, quelque soit la saison.
Doté qui plus est de graffitis, tout cela me parut très intéressant ! J’y aie passé pas mal de temps, car ci-contre il n’était pas esseulé. Les inscriptions me semblent bien être celui d’un homme d’église, accompagnées par exemple d’une rouelle. Et puis comme la plupart du temps, la présence de croix. Amis, observez celle comprise dans le patronyme, sur la première ligne. Il me semble fort possible qu’un homme d’église ait été l’auteur de ces graffitis.
Qu’en pensez-vous ?


À Bussy toujours, en voici un pour lequel nous penserions qu’il s’est trouvé « ébauché » seulement : cadran de gauche.
Quant à l’église, elle jouxte une motte castrale érigée au Sud-est du bourg. La nef unique voûtée d’un berceau en bois et ses deux portes datent de l’église primitive. L’arc en plein cintre de la façade comporte deux tores qui s’appuient sur des chapiteaux sculptés.
Depuis la commune
de Jussy-Champagne
Je ne m’attendais pas à rencontrer ces 3 cadrans.

Qu’est-ce qui peut bien justifier le petit cercle troué sous celui centré, si ce n’est une armature tenant le stylet… voyez-vous autre chose ?

Jussy-Champagne du milieu du XIe siècle, présente l’Agneau Pascal en façade, comme trois autres édifices situés à peu de kilomètres les uns des autres : probablement l’œuvre du même maître que celui d’Avord et de Vornay.


De ce troisième, serait-il une ébauche ?
Bourges

Saint-Pierre-le-Guillard – BOURGES
Lors de ma balade du 06/12/2012

Ce cadran est entouré d’ornements sculptés : une femme sur le côté gauche, homme à droite. Il est posé sur la façade d’une église. Derrière celle-ci, est une imprimerie. L’imprimeur, qui, passant par hasard, me demanda ce que je photographiais. Signaler cette imprimerie est justifiée pour retrouver l’édifice où apparaît le cadran. De fait, il s’agit d’un cadran méridional, lequel a perdu son stylet.
À quelques centimètres près, la photo montre une quasi Pleine Lune : Lune opposition Soleil… Mais là n’est pas ce que nous recherchons. Juste faire diversion, dans la mesure où l’on ne trouve pas ce cadran apposé sur le flanc Sud d’une église.
J’ai toutefois adaptée la photo au message car ce second cadran est apposé sur un un édifice autrefois monastique.
Et avec ceux à Bourges, on n’occultera pas, bien entendu, le gnomon de la cathédrale St-Étienne.

Charenton-du-Cher
Voici le cadran de l’église romane de Charenton. Au regard de celui de Blet, celui de Charenton-du-Cher montre un air de de famille. Le stylet est récent (il aurait possiblement gagner à se laisser patiner un peu).



* Vu sa localisation, il peut s’agir d’un « semi-canonial ».
* Et puis celui-ci porte une inscription : S P.
Lorsque nous nous présentons face à l’édifice, la chapelle très vite reconnue par sa petite croix qui chapeaute à gauche du clocher de Saint-Martin.
14/11/2012
Saint-Amand-Montrond
Situé sur le contrefort méridional




Cadran de type « méridional, de courtes lignes sont chiffrées, et le stylet est en « chevron ».
Orienté et gravé sur de la pierre – Son environnement – Vision d’ensemble…
Attenant à l’ancien édifice du Couvent des Carmes, actuel Hôtel de Ville.
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Saint-Christophe-le-Chaudry
Il en était un, autrefois sur le chevet de l’église romane. La seule trace restante est la barre métallique comme témoin et que je photographiais sur mon premier passage à St-Christophe. Il me paraît évident que les deux ferrures que l’on voit sur la photo ne peuvent être le gnomon médiéval, un écrou et un filetage, un trou dans le métal aussi régulier ?

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Châteauroux
En sont probablement d’autres, mais voici celui que je rencontrais.
Du bon côté de la rue,
balade à Saint-Martial
Par contre le stylet ?…

Plus loin qu’en Berry
Du temps des moines, des cierges étaient gradués, et on les laissaient se consumer pour savoir l’heure qu’il était. À partir du XIVe s., fini, les cierges dans le but de connaître l’heure, ainsi que les cloches d’ailleurs. Arrivèrent rouages et mécaniques sur les frontons de nos églises, remplaçant de fait le « Cadran Solaire ».
Les premières horloges mécaniques n’avaient qu’une aiguille. Ce n’est qu’au XVIIIe s. qu’est apparu la grande aiguille. Aujourd’hui on compte en nano-secondes. Plus le temps pour rien !
Voici ce que dit Michel LALOS à propos de l »Ange au cadran – daté de 1578 : « Un ange sculpté, porte dans ses bras un cadran solaire. Il s’agit d’une copie, l’original est placé dans la crypte. La dite copie a été réalisée à University Hospital à Saint-Louis (USA-MO), .

Bonjour Muriel,
Bravo pour votre site, convivial et riche d’informations touristiques, tout ceci avec le regard d’une personne franchement passionnée. Avec mon épouse nous avons visité vos rubriques mettant passionnément à l’étude votre capacité à montrer le patrimoine et la culture du Berry, vous aimez faire connaître le Berry, ce qui attire beaucoup notre attention.
Nous demeurons à Jussy-Champagne, que vous connaissez puisque un de vos agréables reportages fait montre de photos de notre église et ses cadrans solaires. J’accompagne mon message de remerciements pour votre second retour à Jussy et le sujet à thème ‘ Cadrans d’églises du Berry Roman ‘.
Merci à vous qui œuvrez pour proposer de la qualité, nous le dirons autour de nous.
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Merci Muriel, les cadrans de nos églises sont superbes par votre appareil photo et votre sujet d’étude est passionnant pour lecteur que je suis.
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De belles trouvailles faîtes sur vos visites. Bravo, car comme l’internaute précédent, je trouve passionnant votre article.
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Merci pour le partage, je ne connaissais pas la raisonnante de cadrans canoniaux pour des églises. J’y serais plus attentive maintenant, Muriel. Merci pour cette richesse de patrimoine sur votre site, nous le découvrons depuis cette semaine. Nous aimons et allons y revenir.
Cordialement
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Merci pour ces superbes idées de découvertes et d’observations par le Berry roman. Très belles vos photos.
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Des instants fabuleux de cadrans du Berry, que tu sais nous faire partager.
Merci Muriel !
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Merci beaucoup pour votre article des cadrans solaires sur les églises du Berry roman, passionnant ce que vous publiez !
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Bonjour, je vous félicite pour votre travail !
Très intéressants vos articles du Berry!
Cordialement.
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Je me demande si il y avait de l’importance à graver les heures de messes plutôt d’un côté ou de l’autre d’un mur d’église ? Comment le lire, parce que sur ta photo, ce cadran ne semble pas lire toutes les heures. A mon avis, si c’est une sorte de cadran l’heure devait y être approximative, et les chiffres romains n’ont probablement jamais été gravés autour. Pourtant, on voit bien où était le stylet !
Celui ci me semble un cadran plus rustique, sur cette église.
On peut avoir son nom, gens du Cher ?
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