Pour anticiper sur l’interrogation des visiteurs Berry Au Cœur de France,
amateurs d’Art Roman qui se préparent à une visite en Berry.
Sommaire
Observations extérieures

© Muriel Azemard –
Agnus Dei à Chalivoy-Milon

© Muriel Azemard –
Portail de Saint-Martin

© Muriel Azemard

© Muriel Azemard – Le tympan et trumeau du portail méridional de St-Etienne
Chef-d’œuvre sculpté au tympan: le « Christ en Gloire » entouré des quatre évangélistes ».
À quoi reconnaît-on l’influence bourguignonne selon la tradition ? Serait-ce St-Augustin ?
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I. Mes diverses observations faites à partir de tympans, chevets et portails visités
II. De l’influence des arcatures dites « aveugles »
III. Petit peuple artistique et images de pierre perçues d’un quotidien
Lors de mes pérégrinations, j’ai très souvent remarqué qu’en grande majorité, les transepts sont couverts d’une coupole (voire voute-coupole), surmontée du clocher.
Observations intérieures
Plan – Chapiteaux et colonnes
° Le plan bénédictin
° De l’orientation d’un chapiteau
° Histoire de construction : La galilée
° Un chœur décentré
° Des colonnes qui ne servent à rien?
° Supports et chapiteaux
° Chapiteaux Historiés
Arcatures de couronnement

© Muriel Azemard – St-Outrille
Arcatures aveugles dites également arcatures de couronnement, quand, comme ici, elles viennent couronner la partie supérieure de l’abside ou du chœur. Rien que pour voir l’entrelacs d’un peu plus près.
Les absides de nos églises romanes en Berry sont souvent couronnées d’arcatures aveugles.
Ce n’est pas un caractère particulier à la province, on trouve ce type de décor également en Saintonge, sur certaines églises d’Auvergne et de la Nièvre (La Charité sur Loire en particulier). Les arcs sont toujours en plein-cintre et reposent sur de petites colonnes monolithes façonnées au tour ou de petits pilastres de section carré.
Le clocher tors. Ils sont peu nombreux en France, un seul en Berry Roman.

© Muriel Azemard – St-Outrille
Chapeautée d’un « clocher tors«

En dépit de quelques dégradations, bien compréhensibles à l’extérieur du bâtiment, les colonnettes et pilastres, les petits chapiteaux qui les surmontent, font le plus souvent l’objet d’un décor d’une richesse surprenante où se côtoient une foule de modèles et d’influences diverses. Je vous propose celles que suis allé découvrir, en sont probablement d’autres à ne pas manquer sur vos balades, amis. Avec l’exemple de Saint-Outrille en haut de chapitre, on voit bien comment étaient construites les arcatures de couronnement. Les arcatures aveugles, c’est aussi dans les parties basses et c’est également à l’intérieur des églises.

Ourouer-les-Bourdelins : 2013
Ici à St-Christophe, je suis venue trois fois entre 2009 et 213. Ourouer est dérivé du latin « orare » qui signifie prier, ou qui renvoie à un lieu sacré à la prière. Bourdelins est quant à lui issu de « Bordier », autre nom du métayer. Probablement édifiée par les moines bénédictins dépendant de Cluny, le prieuré était autrefois rattaché à La Charité sur Loire. Jouant la carte régionale, ce lieu de culte de plan rectangulaire reçut au début XIIe une abside en hémicycle et deux absidioles. Un passage berrichon donne accès à une chapelle seigneuriale Saint-Pierre.

Chalivoy-Milon : 2022
Dans le Cher, les arcatures du côté sud du chœur.

St-Amand-Montrond : 2016

Neuvy Saint-Sépulchre : 2017
C’est vrai qu’à Neuvy Saint Sépulcre, ce n’est pas simple d’apprécier la rotonde avec recul, sans parler du risque de se faire écraser par une voiture.
De l’orientation d’un chapiteau
Les sculpteurs travaillaient sous la direction d’un Maître d’œuvre, on l’oublie trop souvent. C’est donc bien la spiritualité des religieux de l’époque de réalisation qu’il faut considérer. La difficulté est qu’aux XIe et XIIe s., la spiritualité est très évolutive. La montée en puissance de la Réforme Grégorienne, entre autres, génère une quantité d’images, il en est de même pour l’idée de croisades.
Étant amenée à analyser plusieurs spécimens en cours d’être traités dans mes publications, j’y vois désormais des analogies et autres liens entre « décors » et « emplacements », lesquels bien distincts pour les sanctuaires que j’ai visités jusqu’à présent. Le choix des sujets et de leurs emplacements ne doit rien au hasard. Pour exemple, les chapiteaux sculptés que j’observais à Thaumiers, celui du « Diable » qui incarne l’enfer pour les chrétiens, se trouve au Nord de l’église. Or, dans les sculptures romanes, le Nord qui ne voit pas le soleil symbolise l’enfer. Par contre, au Sud, j’ai pu observer, via d’autres sanctuaires, des chapiteaux ornés notamment de palmettes, de feuillages, la toute expression de dame Nature qui symbolise la vie éternelle et le paradis.
Autres remarques que je fis sur place. Les chapiteaux sculptés de monstres, de représentations du « Mal » sont des modèles hérités du monde Celte, ou tout ce qui évoque le Mal chez les chrétiens. Ainsi, on découvre à Augy-sur-Aubois le chapiteau aux serpents. Çà c’est Enfer ! Ce chapiteau est situé au Nord, dans le chœur. Autrement dit, les serpents ainsi placés, montre l’homme se débarrassant du mal (serpents) par le baptême, la prière, les rites religieux.
Toutefois, ce n’est probablement pas aussi simple. Ce que je dis être « monstres issus du monde celte », n’en sont pas toujours. À titre d’exemple, l’homme feuillu – connu également sou l’appellation Green Man – représente chez les celtes le gardien du sanctuaire, il habitait les grands arbres qui entouraient et protégeaient le lieu de culte. On le retrouve dans de très nombreuses églises romanes berrichonnes, le plus souvent à gauche du maitre autel, côté nord.
J’ajoute que les églises romanes ont un axe – approximativement Est-Ouest – qui sépare l’église entre côté lunaire au Nord et côté solaire au Sud. Dans de nombreuses églises, on trouve côté lunaire, tout ce qui représente l’esprit de la Nature, de la terre-mère, le principe féminin. Côté sud, côté solaire, c’est l’Homme qui domine, le principe masculin, la Déité, et certains animaux, bien souvent le lion.
Les nombres évoqués par la composition des chapiteaux
sont importants également
On observe souvent le deux (dualité, ambivalence) et le quatre (Terre) du côté Nord et du côté Sud le trois et le cinq. Il y faudrait des illustrations et des plans d’églises pour mieux comprendre. Où ça se complique, c’est qu’il existe également des églises solaire-solaire et des lunaires-lunaire, même si cette dernière catégorie sont un peu plus rares.
Enfin, le commanditaire est à prendre également en compte, les moines noirs (OSB) réagissaient souvent différemment des chanoines séculiers. Quant aux chanoines réguliers ou chanoines pauvres, ils étaient encore, à la fin du XI° siècle, un tantinet évolutionniste, et ce point a également une influence sur le décor et sa répartition spatiale.
C’est passionnant , on est au cœur d’une interprétation globale d’une église romane et non plus comme cela nous est arrivé souvent dans une interprétation chapiteau par chapiteau, image par image beaucoup plus sujette à caution.
Chapiteaux Historiés
Un chapiteau historié est un chapiteau qui raconte une histoire, Monsieur de la Palisse vous aurait dit à peu près la même chose.
Les chapiteaux historiés illustrent des scènes de la Bible, Ancien ou Nouveau Testament, mais également des épisodes de la vie des Saints. Ils apparaissent dans l’art roman au milieu de la première moitié du 11° siècle (1020/1030). Certains historiens pensent même, que le premier chapiteau de ce type, serait la fameuse fuite en Egypte de la Tour porche de l’abbatiale de Saint Benoît sur Loire.

© Muriel Azemard – Eglise de Blet – Cher
L’intention est simplement de faire le tour de quelques chapiteaux historiés en les regroupant par famille d’influence et en s’attachant à ceux qui sont le moins connus. Je vous propose de continuer la grande virée romane à la recherche des chapiteaux historiés originaux et méconnus de notre petite province berrichonne, grâce à mes nombreux périples réalisés sur reportages.
Le type de chapiteau, entre autres, va permettre ou non de dérouler l’instant de la Bible en deux, trois ou quatre épisodes ou en un seul, le rendant ainsi plus ou moins compréhensible au public. La composition et surtout la manière d’imaginer la scène chez un artiste qui ne savait pas lire, ont également une forte influence. On pourrait même prendre en compte le talent. Si ces éléments n’avaient aucune influence, tous les chapiteaux liés au même passage biblique se ressembleraient plus ou moins, ce qui est loin d’être le cas, même s’ils racontent tous la même histoire, on va au moins s’accorder là-dessus.
Ma visite en l’église de Blet
A une quarantaine de km au Sud-Est de Bourges, en direction de Moulins, sur la route reliant Chalivoy-Millon à Flavigny, s’élève l’église romane de Blet. Aller à la découverte de Saint-Germain, c’est entrer dans son histoire. De son passé subsiste un très bel ensemble de chapiteaux romans, depuis la nef, alors que ceux du chœur sont touts peints. Cette église ô combien intéressante, abrite trois chapiteaux historiés, deux sont particulièrement originaux, ils sont situés sous le transept.
Ce qui caractérise le plus les chapiteaux historiés romans, c’est leur fidélité au texte, même si souvent cette fidélité s’exprime au travers d’images qui peuvent nous paraître naïves.

© Muriel Azemard – Eglise St-Germain
J’ai aimée photographier Blet, car nous pouvons observer une grande richesse de sculptures romanes, de jolis chapiteaux aux décors de de feuilles d’acanthe, le chapiteau de la sirène, la scène du repas et les 13 personnages debout. Deux d’entre eux étaient visibles de la nef et pouvaient donc avoir été disposés à cet endroit – piliers du transept – pour être à la vue des laïcs, le troisième est dans la nef.
Ci-dessus, un chapiteau majeur de l’église et peut-être même du Berry Roman, le chapiteau de Lazare et du Mauvais Riche. L’iconographie de la parabole représentée ici est très proche de ce que l’on peut voir au tympan de Moissac. Le pauvre Lazare est sous la table du Riche, il cherche à se rassasier des miettes tombées de la table sur laquelle le Riche et ses frères font bombance.
Le Riche (l’homme à la barbe courte situé dans l’angle du chapiteau) est tourmenté par des démons. Des chiens, également sous la table, lèchent les ulcères de Lazare. Le pauvre Lazare meurt et son âme représentée par un enfant nu s’échappe de sa bouche et est recueilli par Abraham en son sein.
On reconnaît bien évidemment la Cène
L’originalité tient dans le fait que cet épisode de la Passion du Christ est rarement représenté sur un chapiteau historié, sans doute à cause de la difficulté de composition. On n’en connaît pas d’autres en Berry Roman.

Pour ce qui est des personnages, s’élèvent « 13 » bustes. Celui au centre est réhaussé, sa tête est logée sous la niche en angle. Sont de fait 26 jambes, les apparaissances de la scène générale.
La table est circulaire, les pains sont dressés sur la tranche pour être rendus visibles d’en bas. Le Christ est au centre et placé sous une arcade en plein cintre ménagée dans l’abaque. Les jambes des convives apparaissent sous la table, ils ont les pieds sur un décor végétal à feuilles très élancées comme on en trouve beaucoup dans le secteur : Chalivoy-Milon, Ourouer ci-dessous et Dun sur Auron entre autres. On remarque comme sur les fresques, le personnage à la droite du Christ qui s’appuie sur sa poitrine.
À partir de 1150 -1160, ils disparaissent quasi complètement, on transpose alors cet enseignement catéchétique sur les vitraux. Vous lirez ou vous avez sans doute déjà lu des auteurs qui vous parlent de Bible de pierre ou de verre destinée à des laïcs qui, ne sachant pas lire, pouvaient accéder à la connaissance des textes sacrés de cette manière.

© Muriel Azemard – Ourouer-les_Bourdelins – Cher
Attention cette assertion doit être relativisée. Il ne faut jamais dissocier l’image (chapiteau ou vitrail) , du prédicateur qui se tenait en bas et utilisait ces images pour illustrer son sermon ou son prône. Les chapiteaux historiés nous fournissent donc de précieuses indications sur les principaux thèmes de prédications de l’époque.
À partir de 1150 -1160, ils disparaissent quasi complètement, on transpose alors cet enseignement catéchétique sur les vitraux. Vous lirez ou vous avez sans doute déjà lu des auteurs qui vous parlent de Bible de pierre ou de verre destinée à des laïcs qui, ne sachant pas lire, pouvaient accéder à la connaissance des textes sacrés de cette manière. . Attention cette assertion doit être relativisée. Il ne faut jamais dissocier l’image (chapiteau ou vitrail) , du prédicateur qui se tenait en bas et utilisait ces images pour illustrer son sermon ou son prône. Les chapiteaux historiés nous fournissent donc de précieuses indications sur les principaux thèmes de prédications de l’époque.
Déols
J’imagine bien que les amateurs et les passionnés se seront rendus sur le site de l’Abbaye de Déols et découvrir ce qu’il reste visible des vestiges. Comment transformer notre vison du peu qu’il nous reste à voir de l’architecture grandiose et du rayonnement spirituel qui a été, ici ? De Déols, que voyez-vous ?… Plusieurs réponses sont en fait possibles. Au fur et à mesure de notre compréhension et de notre ressenti, sur place, lors d’une visite initiatique incontournable. Aussi, par quelques écrits sur l’Abbatiale, vous ouvriront des portes.
© Muriel Azemard – 03/09/2013

Ce qu’il reste visible du mur Sud du narthex.
Scène historiée « Daniel dans la fosse aux lions »

Selon les symboles de l’art roman : le Centaure
Portail roman
de la cathédrale de Bourges
Voici deux chapiteaux tardifs que je photographiais au portail Sud de la cathédrale :
° Celui de g. appartient à la mythologie Grecque, selon l’enlèvement de Ganymède. Ce qui en fait bien un chapiteau historié. De plus, il signe de manière magistrale l’influence bourguignonne, tant par le style que par le thème, rappelons nous Vézelay. Ci-contre, chapiteaux et sculptures romanes des piliers droits du portail Sud – vers 1160.

© Muriel Azemard – Cathédrale de Bourges
° En seconde partie de droite, cela évoque l’histoire de Samson. Une image fidèle au texte biblique : Samson immobilise le lion avec sa jambe gauche et tente de lui ouvrir la gueule jusqu’à ce qu’elle se brise. Les chapiteaux historiés Sud sont peu connus, en dépit de leur emplacement et de leur excellente facture, on vient avant tout à la cathédrale pour voir du gothique et on rentre un peu vite.

© Muriel Azemard – Châteaumeillant
La Genèse : » Le Meurtre «
ll s’agit de la scène où Caïn frappe d’un morceau de bois Abel son frère.
Le visage de Caïn est représenté bouche ouverte et dents visibles qui traduisent la colère.
Si vous vous trouvez devant ce chapiteau – autres aussi – observez bien les détails contenus. Notamment, la présence d’un ange qui jaillit d’un feuillage afin de faire passer l’âme d’Abel du Terrestre au Céleste, tout de suite après trépas. L’imagier a représenté l’ange se tenant dans l’angle droit, sous le tailloir. Il y a une inscription au-dessus de la scène qui, même avec agrandissement, je n’ai pu déchiffrer.

© Muriel Azemard – Châteaumeillant
Les chapiteaux historiés sont d’un grand intérêt pour les amateurs d’Art Roman, on entend souvent la question : « où pourrions nous en voir d’autres » ? Dans l’Indre ils sont sans doute plus nombreux que dans le Cher. En fait dans l’Indre, ils sont très concentré dans trois églises que l’on peut qualifier de majeures : Chatillon sur Indre ci-dessous, Saint Genou et Gargilesse, alors que dans le département du Cher, ils sont un peu plus dispersés.
Ce que l’on peut en dire, c’est qu’ils sont trop, beaucoup trop peu connus, et de fait, je me suis focalisée plutôt sur ceux dont aucun guide (en papier glacé) ne parle – lors de mes itinérances réalisées dans le cadre du Berry Roman à vélo.

© Muriel Azemard – Châtillon-sur-Indre
Très proche à la fois de la Touraine et de la région Poitou-Charentes. Le temps de ressortir le Cd réalisé sur mon reportage, parce que je veux vous montrer la visite des Saintes Femmes au tombeau, le matin de Pâques. L’une d’elles porte les onguents, à gauche, l’Ange leur désigne du doigt des soldats endormis. Complètement à gauche, un personnage assis à identifier. Ce chapiteau à publier n’ayant pas de corbeille corinthienne, ceci facilite donc la continuité de la scène sur les trois faces. Le thème est courant chez nos voisins Auvergnats, en Berry beaucoup moins.
ll est naturellement impossible de tenter une interprétation un tant soit peu sérieuse, d’un chapiteau ou d’un ensemble de chapiteau, sans rechercher des références bibliques. Pour autant, c’est insuffisant. L’art Roman est avant tout – comme toute forme d’Art – l’expression d’une pensée, celle de l’époque. Certains pères de l’Église, Saint Augustin, Saint Jérôme et d’autres, ont eu une influence énorme aux 11° et 12 e s., ainsi que des théologiens contemporains de l’époque romane. Là encore, la liste est longue, on ne peut pas négliger leurs apports. Je pense notamment aux écrits de Saint Augustin sur la symbolique des nombres, ou bien aux auteurs du physiologus.
Enfin on ne doit pas oublier non plus que pour diverses raisons sur lesquelles on s’est déjà exprimé sur ce forum, les artistes romans se sont inspirés des mythologies antiques, la Grèce et l’Égypte, bien sur mais aussi la mythologie Celtique.

© Muriel Azemard – Chambon – Cher
Église Saint-Pierre
Chambon Cambonum, de cambo (courbe d’une rivière – Arnon) est située à 3 km au Nord-Est d’Ineuil. St-Pierre s’est construite au XIIe siècle. Ci-contre le joli portail roman caractérisé par ses décors très ouvragés.
Je vous montre de plus près. D’abord des chapiteaux sur colonnettes et ce très joli portail, dont la présence de personnages, traduit une influence corinthienne. Bien visible, non seulement par l’expression des visages, également par la frise du tailloir : surtout la frise aux triangles. Un portail peu commun pour le moins ! Sur la façade ornée de colonnettes, au-dessus du portail, trois arceaux en saillies les uns aux autres.
Symbolisme rapporté à la Sculpture
° Sur la piste des Éléphants : le long d’une voie que l’on sait avoir été très fréquentée au Moyen-âge.
Les chapiteaux des éléphants, dont j’essayais de décoder leur symbolique, est à mon sens un bel exemple de pérégrination d’un même artiste roman, ou bien d’un même atelier sur un itinéraire cohérent entre Berry et Bourbonnais. Les exemples de ce type sont nombreux.



Sujets d’étude annexes
° La loi du cadre
Un sujet intéressant, vu sous l’angle de l’Histoire de l’Art. Selon la « loi du regard » en matière d’observation allant aux chapiteaux, je vous propose cette fois ce fil à suivre, relié à l’importance de la loi du cadre.
Pour tout artiste, qu’il soit sculpteur ou peintre, la loi du cadre constitue une contrainte importante, propre, dans certains cas, à obérer la créativité. C’est à cause de cela que les artistes répugnent encore de nos jours à répondre à une commande, s’ils le font, bien souvent, c’est pour des raisons strictement alimentaires, il faut bien faire bouillir la marmite et mettre un peu de bois dans la cheminée.
À l’époque romane, la sculpture sur chapiteaux est à cet égard particulièrement contraignante, le cadre, les limites spatiales de l’œuvre sont en fait fixés d’avance et le tailleur d’images ne pouvait y déroger, n’ayant pas d’autre choix que de tout mettre à l’intérieur du cube ou du tronc de cône primitif.
La loi du cadre est toujours une contrainte pour l’artiste. On peut bien sûr se poser la question « peut-on penser en dehors du cadre » ? Mais ce qui est remarquable, c’est surtout d’observer comment cette loi du cadre, surtout pour les chapiteaux, a développé la créativité des tailleurs d’images en associant toujours la loi du cadre à l’horreur du vide qui caractérise la sculpture des chapiteaux et des tympans romans
On observe le développement de cette créativité en comparant l’évolution des modes de composition depuis les touts débuts de la sculpture romane (1° moitié du XI° siècle) jusqu’à son époque de floraison (un siècle plus tard). Le plus remarquable est à cet effet le chapiteau historié. Comment « mettre en scène », en image la narration d’un épisode biblique sans déroger à la fameuse loi du cadre ? C’est autrement plus compliqué que pour un chapiteau à vocation plus décorative ou strictement symbolique.
Pour le fresquiste, la loi du cadre est en partie estompée par un souci technique encore plus contraignant, la prise – le séchage – de la fine couche de mortier de chaux sur laquelle il opérait. Celle-ci l’obligeait à diviser la narration en petites surfaces juxtaposées un peu à la manière d’un auteur de bandes dessinées.
Tant la loi du cadre, que la façon dont les tailleurs d’images romans cherchaient à s’en affranchir.
Pour exemple, ci-contre, un remarquable élément de la sculpture romane – vers 1140 – illustration d’un jongleur encadré par une voussure du portail de l’ancienne église de St- Pierre-le-Poelier à Bourges, désormais détruite. Heureusement conservée au Musée des Beaux Arts de Lyon : Vignette issue de la photo d’origine Alain Basset.

De fait un magnifique exemple de sculpture entièrement soumise à la contrainte de la loi du cadre, la forme de la voussure. Pourtant observez l’élégance du geste, l’impression de mouvement… N’est-ce pas génial ?
Tétramorphe

© Muriel Azemard – Bourges
Lion, Taureau, Aigle, Homme – Figures des Evangélistes
Chârost
La période romane offre une belle animalerie médiévale en termes de sculpture et l’un des motifs le stables faisant partie de celle-ci, sont les 3 animaux et l’homme qui encadrent le Christ en Gloire, tels ici à Bourges, depuis le tétramorphe du tympan roman, au portail.
Au sein d’une flamme mystérieuse, Ézéchiel voit : « quatre êtres vivants, dont l’aspect figurait la ressemblance d’un homme. Chacun d’eux avait quatre faces et chacun quatre ailes ». L’Apocalypse établit un ordre différent, faisant d’abord apparaître le lion, suivi du taureau, de l’homme et enfin de l’aigle.
Les artistes qui se sont emparés de ces textes les ont traités généralement avec respect, en apportant peu de variations. Une très agréable itinérance faite, en partance de St-Amand pour rejoindre Chârost sur itinéraire Jacquaire, selon la via Lemovicensis « branche nord« , direction de Bourges.

© Muriel Azemard – Chârost



Bonjour Muriel, je trouve vos articles passionnants. Je parcours très souvent votre blog pour cela et je reçois aussi vos nouvelles publications. Merci beaucoup pour le précieux travail réalisé sur votre site du Berry. En regardant la photo de Bouges, je lui trouve des représentations communes avec l’historié de Daniel dans la fosse aux lions.
Je pencherais par ici pour ce qui concerne mon point de vue.
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Vu les chapiteaux de Déols. C’est pour cela et aussi pour le plaisir du patrimoine, que j’aime venir. J’ai visité Déols deux fois, j’ai du mal à imaginer (sans tomber dans les extrêmes) et vaste question à laquelle on ne pourra peut-être pas répondre, de la force de cette abbaye pour la comprendre tout à fait. On ne peut pas vraiment étudier cette abbaye à une échelle trop » locale « , c’est un héritage clunisien qui d’après moi dépasse le Berry.
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Merci Muriel pour votre partage, l’année commence bien, j’ai lu votre édito sur vos projets, par rapport à ce qu’il vous reste à publier de votre précédent site. Cet article est intéressant. Bonne continuation à vous.
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Or, depuis le IVe siècle, l’authentique doctrine chrétienne, est devenue ésotérique lorsque le christianisme devint une religion officielle donc exotérique (Nicée). Par la suite, cette authentique doctrine chrétienne dite primitive s’était réfugiée dans le monachisme qui la transmettait de façon initiatique à l’ombre des cloîtres. C’est l’essentiel de cette doctrine que nous révèlent toutes les sculptures romanes.
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Bonjour Muriel, merci pour tes recherches et publications. Jolis détails commentés.
Je trouve ce que tu présentes franchement intéressant, c’est un partage complet.
Sincère merci.
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